Big (band) is
beautiful
Crédit : lesacre.com |
A la tête de son
éclectique Sacre du Tympan depuis bientôt
vingt ans, le chef d’orchestre et compositeur Fred Pallem s’y connaît en
musique taille XXL. Ça tombe bien : il vient de prendre la présidence de Grands formats, la fédération des grands ensembles de
jazz et de musiques improvisées. L’occasion pour Ca c’est du jazz de tailler une bavette avec le nouveau patron.
Ca c’est du jazz. Pour ceux qui l’ignoreraient, peux-tu rappeler ce
qu’est Grands formats, et surtout à quoi ça sert ?
Fred Pallem. C’est
une fédération d’orchestres qui regroupe des gens qui aiment faire de la
musique en grande formation, avec un minimum de huit musiciens. L'objectif est de
défendre leurs créations.
CCDJ. Pourquoi faut-il les défendre ?
FP. Fédérer les
artistes, cela leur permet de peser un peu plus lourd vis-à-vis des
institutions. Imaginons que l’Etat ait besoin de distribuer de l’argent pour la
musique. Ce sont des choses qui arrivent (rires).
Le ministère va convoquer les syndicats, les fédérations de directeurs de salles,
de producteurs, d’éditeurs… Et les artistes vont faire la gueule parce qu’ils
ne seront pas conviés… Mais c’est normal, parce qu’ils ne sont pas fédérés ! Grands formats veut donc jouer ce rôle d’interlocuteur vis-à-vis des différents partenaires.
CCDJ. L’enjeu, c’est d’aller chercher des subventions ?
FP. Attention :
ceux qui arrivent à Grands formats parce qu’ils pensent qu’ils vont avoir plus
de subventions et de concerts, ça ne sert à rien qu’ils viennent ! Mais c’est
vrai que les musiciens qui jouent en grande formation sont confrontés plus
directement à des problèmes de financement. Un artiste solo fonctionne avec un
manager, un éditeur, un tourneur, et il peut faire sa création. Un orchestre
doit se structurer, monter une asso ou une boîte, chercher des fonds, faire une
compta… Fatalement, ça coûte plus cher. Mais il faut relativiser : pour
une scène nationale, par exemple, faire venir une grande formation n’est pas
plus onéreux que de faire venir une compagnie de théâtre.
CCDJ. Du coup, ce sont les programmateurs qu’il faut sensibiliser ?
FP. Oui. Nous sommes bientôt une cinquantaine d’orchestres professionnels. Cela représente entre 700 et 1000 musiciens par an, plus de 200 concerts… C’est beaucoup ! C’est une grosse force de proposition artistique. Les programmateurs ne peuvent plus passer leur temps à programmer des quintets et des trios. J’adore le trio piano-basse-batterie, mais je ne peux pas écouter que ça. C’est comme si je ne mangeais que des pâtes et du riz : ce ne serait pas bon pour ma santé auditive. Si on ne défend pas la musique en grande formation, il n’y aura plus que des trios, et le public va s’emmerder.
CCDJ. Du coup, ce sont les programmateurs qu’il faut sensibiliser ?
FP. Oui. Nous sommes bientôt une cinquantaine d’orchestres professionnels. Cela représente entre 700 et 1000 musiciens par an, plus de 200 concerts… C’est beaucoup ! C’est une grosse force de proposition artistique. Les programmateurs ne peuvent plus passer leur temps à programmer des quintets et des trios. J’adore le trio piano-basse-batterie, mais je ne peux pas écouter que ça. C’est comme si je ne mangeais que des pâtes et du riz : ce ne serait pas bon pour ma santé auditive. Si on ne défend pas la musique en grande formation, il n’y aura plus que des trios, et le public va s’emmerder.
CCDJ. Comment ton histoire avec Grands formats a-t-elle débuté ?
FP. Je suis membre
de Grands formats depuis le début, en 2003. A l’époque, c’est Patrice Caratini
qui m’avait appelé. Le Sacre du Tympan était alors l’un des seuls orchestres de
jeunes de l'association. Je jouais le rôle de représentant des nouvelles générations, mais je ne
comprenais pas forcément ce que je faisais là. Au fil des années, je me suis de
plus en plus impliqué dans le côté extra-musical de mon orchestre, et donc
aussi dans Grands formats. J’ai progressivement compris qu’il était important
de se fédérer. Quand Fred Maurin, le chef d’orchestre de Ping Machine auquel je
succède, a décidé d’arrêter, le Conseil d’administration m’a proposé de prendre
la présidence. Je ne m'étais pas présenté, mais je ne pouvais pas leur dire
non. J’étais touché, et surtout, je savais qu’on est tous dans le même bateau,
qu’on doit tous mettre les mains dans le cambouis. Il faut bien un
interlocuteur, on ne peut pas aller à un rendez-vous au ministère à
cinquante !
CCDJ. Quel est ton programme pour ce mandat de président de Grands
formats ?
FP. Grands formats
est en train de changer. Nous sommes longtemps restés autour d’un effectif de dix
ou quinze orchestres, mais ce nombre a beaucoup augmenté au cours des dernières
années, avec notamment pas mal d’orchestres de jeunes. Je voudrais essayer de
continuer à élargir le spectre musical, pour ne pas limiter Grands formats au
jazz. Je voudrais aussi limiter les clivages, notamment celui entre les vieux
et les jeunes. Voilà pour la cuisine interne. Pour ce qui est de l’externe, j’aimerais
mettre l’accent sur la communication : les institutionnels savent qui nous
sommes, mais pas forcément les musiciens. Et enfin, j’aimerais travailler sur
l’aspect international, avec un projet de fédération étendue à l’échelle
européenne.
CCDJ. Tout cela risque de te prendre du temps. Est-ce que tes projets
musicaux ne vont pas en souffrir ?
FP. Je n’ai pas
l’intention de me taper tout le boulot (rires) !
Je ne suis que la figure de proue, tout le monde va mettre la main à la pâte. Fred Maurin
a fait un boulot titanesque, j’ai prévenu le conseil d’administration que je ne
pourrai pas faire la même chose. Je vais déléguer beaucoup plus, et je vais
continuer à faire de la musique : j’ai plein de projets en cours et des
disques qui arrivent !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire