dimanche 18 décembre 2016

Nasheet Waits Equality - Between Nothingness and Infinity

Du beau son, du gros son



Imaginez un quartet qui marcherait à l’électricité, et qui serait alimenté par une centrale nucléaire. C’est à peu près à cela que ressemble Equality, le groupe de Nasheet Waits, entièrement remanié depuis sa dernière apparition discographique en 2008. Ce groupe a livré en novembre dernier chez Laborie Jazz un véritable concentré d’énergie baptisé Between Nothingness and Infinity. Survoltés mais disciplinés, le batteur new-yorkais et ses acolytes y cisèlent un groove implacable à base de polyrythmie, de boucles entêtantes et de solos inspirés.

samedi 3 décembre 2016

Wayne Shorter Quartet à la Philharmonie de Paris

Un critique ne devrait pas dire ça


On ne devrait jamais dire qu’on a vu le meilleur groupe de jazz du monde. Même quand il s’agit du Wayne Shorter Quartet, de passage à la Philharmonie de Paris mardi dernier. On ne devrait pas le dire, mais cela n’implique pas qu’on doit bouder son plaisir. Car ce qui s’est passé ce soir-là dans la salle Pierre-Boulez avait quelque chose d’exceptionnel. Un grand moment de liberté musicale. Le public l’a bien senti. Debout après le deuxième rappel, il a respectueusement salué un artiste qui sait se réinventer à chaque phrase, alors qu’il a 83 ans et qu’il n’a vraiment plus rien à prouver.

Sphinx bien calé dans le coude du piano à queue de Danilo Pérez, Wayne Shorter est tout en économie de moyens. Mardi soir, il était bien plus avare de ses notes que sur son dernier disque, pourtant enregistré en live avec la même formation. Effet de l’âge, diront certains. Peu importe. Car la musique que ce quartet a donnée mardi soir y a, il fallait le voir pour le croire, gagné en intensité.

jeudi 17 novembre 2016

Dave Liebman Group : Expansions Live

Sans concessions
Un jazz avant-gardiste et spectaculaire, savant et toujours sur la brèche. C’est ce que propose Dave Liebman sur Expansions Live, le dernier album de son Group paru en octobre chez Whaling City Sound. Si le titre de ce disque peut sonner comme une référence à Coltrane, il y a longtemps que le Lieb, 70 ans, s’est émancipé de la figure tutélaire de tous les saxophonistes. Et ce pour le plus grand bonheur des auditeurs.

samedi 22 octobre 2016

Moutin Factory Quintet : Deep

Assis sur un volcan

Les jumeaux du jazz français ont encore frappé. Avec Deep, le dernier album de Louis et François Moutin sorti fin août chez Jazz Family, les deux frangins proposent un disque en forme de volcan. Leur Factory Quintet, renouvelé pour l’occasion (Jean-Michel Pilc remplace Thomas Enhco au piano), y navigue entre éruptions destructrices et moments trop calmes pour être vrais. Lyrisme, groove, liberté, énergie, tout y est.

La musique doit beaucoup à François, le contrebassiste-à-tout-faire : il expose les thèmes, improvise, accompagne… Virtuosité spectaculaire et mise en place impeccable ne sont chez lui que les ingrédients de quelque chose de plus important : le son. On entend ses doigts pincer les cordes, les cordes frapper la touche, à tel point que l’auditeur a l’impression que l’instrument se trouve dans son salon. Un bonheur.

vendredi 14 octobre 2016

Emile Parisien Quintet : Sfumato

L'art de la conversation
Si vous vous êtes déjà demandé ce qu’était ce fameux interplay qui fait tant vibrer les musiciens de jazz, allez donc jeter une oreille sur Sfumato, le dernier disque du saxophoniste Emile Parisien. Sur cet opus paru chez ACT fin septembre, l’artiste cadurcien donne une belle démonstration de jazz interactif.

Il faut dire que pour ce nouveau projet, Emile Parisien a su s’entourer. Manu Codjia, toujours aussi inventif à la guitare, virevolte autour d’une section rythmique de choc (Simon Tailleu à la basse et Mario Costa à la batterie), tandis que Joachim Kühn fait sonner un piano fort et clair.

dimanche 2 octobre 2016

Nils Petter Molvaer : Buoyancy

Atmosphère, atmosphère
Difficile de parler de Nils Petter Molvaer sans tomber dans les clichés. Grands espaces, froids polaires Les images mentales que suscite Buoyancy, le dernier album du trompettiste norvégien paru ce mois chez OKeh, ont une inévitable coloration nordique. Mais il serait injuste de réduire ce nouvel opus à un vague parfum scandinave.

Certes, Nils Petter Molvaer fuit la virtuosité, ce qui lui donne des airs de grand sage glacé. Pas de solos vertigineux sur Buoyancy, le trompettiste préfère les laisser à ceux qui aiment ça. Mais s'il économise ses notes, il nest pas avare de sons : entre effets de distorsion et nappes psychédéliques, le soufflant brouille les pistes à coups d’électronique. A tel point quil arrive parfois à nous faire douter : est-ce une trompette trafiquée que nous entendons, ou bien une guitare saturée ?

dimanche 25 septembre 2016

Brad Mehldau et Joshua Redman : Nearness


The nearness of them
Le moins que lon puisse dire est que ces deux-là se connaissent bien. Brad Mehldau (piano) et Joshua Redman (saxes ténor et soprano) jouent ensemble depuis plus de 20 ans. Les chanceux qui les ont entendus en duo, lors de leurs concerts européens de 2011, sen souviennent encore. Pour les autres, il y a désormais un disque qui vient de paraître chez Nonesuch, et qui rassemble six morceaux enregistrés lors de différentes étapes de cette mémorable tournée.

Les deux Américains ont choisi dappeler cet album Nearness, mais cest un euphémisme. Ou de la fausse modestie. Car plus que de proximité, on serait tenté de parler dosmose pour caractériser la musique quils nous donnent à entendre.